Il est rare d'avoir des observations sur le long terme quant à l'entraînement de sportifs de haut niveau. L'entraînement de grands champions est fait de fantasmes savamment orchestrés et de secret.
Il est rare qu'un Boe, un Pogacar, un Luis en montre ou en dévoile trop. La facilité qui peut se dégager d'une performance est souvent le fruit d'un intense travail dont on ne connait pas grand chose si on ne passe pas soi-même par une pratique de haute performance ou si on n'a pas accès à un lieu d'entraînement.
En parallèle, les entraîneurs n'aiment pas forcément disserter en public sur leur manière de faire. Je viens de relire le livre de Philippe Lucas car j'adore le personnage mais à l'achat, je savais d'ores et déjà que je n'aurais rien de concret sur une manière de travailler.
Moi-même, j'aime bien échanger mais il y a des choses qui fonctionnent bien et je n'ai pas envie de les partager; car quand je dis que cela fonctionne bien, cela sous-entend que cela génère de la performance. Et quand on est entraîneur, la performance est le gagne-pain.
Pourtant je suis tombé sur un très bon article (https://www.researchgate.net/public...) retraçant une partie de la carrière internationale de Marit Bjørgen, l'une des meilleures fondeuses de l'histoire du ski de fond, capable de performer sur des épreuves de type sprint comme longue distance.
Si les bases d'organisation de ses saisons n'ont rien d'extraordinaire avec une grosse partie du travail d'avant-saison à partir d'activités variées avant de retrouver les skis en début d'automne, on peut par contre remarquer que la répartition des efforts à l'échelle de la saison tourne sur des bases de:
92% d'effort de basse intensité,
3% d'effort à une intensité située entre les 2 seuils,
5% d'effort au-delà de SV2 (incluant les quelques 30 départs sur 4 mois de saison).
Un bel exemple d'utilisation de la polarisation de la charge d'entraînement: le ski de fond, au même titre que le triathlon, le cyclisme ou le trail, demande de nombreuses heures pour donner à l'organisme les capacités d'utiliser le bon sustrat au bon moment.
Le retour de cette étude est particulièrement intéressant sur l'utilisation importante de l'entrainement en altitude. Bien sûr, pour trouver de la neige, ça aide mais pas que.
Marit Bjørgen passait en moyenne 50 à 70 jours en altitude répartis sur 5 stages tout au long de la saison (donc la recherche de neige était accessoire) pour 25% du volume annuel (énorme).
Le fait d'être en altitude oblige le sportif à faire un peu plus d'endurance pour obtenir des adaptations de l'organisme adéquate (création de globules rouges, utilisation préférentielle des graisses à l'effort).
Lorsqu'on réside à 1600-1800m d'altitude et qu'on varie les efforts entre les basses et hautes altitudes (entre 1000 et 3000m => LHTLH), on obtient de très bons résultats sur la condition physique du sportif d'endurance.
Les principales adaptations sont:
augmentation de la masse en hémoglobine,
part plus importante de l'utilisation des graisses à l'effort intense,
assêchement générale (attention, on perd des graisses mais aussi de l'eau).
Et j'ajouterai, ce que les études scientifiques ne mesurent pas, qu'on devient plus rustique car en montagne, rien n'est facile.
Pour aborder une épreuve en altitude comme en plaine, il devient nécessaire de prendre l'air des montagnes pour progresser, Marit Bjørgen en est un bel exemple.
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